Witch Wolf : Article 1 : On ne se mélange pas by Chevallier Laurence

Auteur:Chevallier, Laurence [Chevallier, Laurence]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Black Queen Éditions
Publié: 2021-10-21T22:00:00+00:00

Chapitre 18

Sixtine

Que c’est long ! Même les audiences les plus ennuyeuses ne m’ont jamais paru durer autant ! Et bien que ce lit qui remplace mon ancienne couchette soit un peu moins dur, il reste aussi inconfortable que les bancs de bois spartiates de la Cour de justice.

Les filles s’ennuient-elles aussi ? Pourquoi avons-nous été séparées ? D’abord Eli puis Neeve… Est-ce une tentative pour nous déstabiliser ? Vivent-elles un calvaire plus insoutenable encore ? Sont-elles suppliciées ? Abusées peut-être ?

Ça suffit, Sixt ! Cesse d’extrapoler, si ça se trouve, elles vont bien…

Elles vont bien…

Elles vont bien.

Elles vont… bien.

Incapable de rester statique, je saute du lit et piétine dans ma minuscule cellule de quatre mètres carrés. Ça a au moins le mérite de me réchauffer, on se gèle dans cette cave !

Un tour. Deux tours. Trois tours.

Les pierres érodées et suintantes pour seul spectacle.

Au moins, ces nouvelles fringues ne sentent plus le moisi, mais les plantes fraîches. J’imagine qu’ils sont écolos, ces loups, puisqu’ils vivent au cœur de la forêt et que leur lessive est a priori constituée de lierre et de plantes en tout genre. On a au moins ça en commun. Juste ça, en fait.

Quatre tours. Cinq tours.

— Ouvrez la porte, s’il vous plaît.

Cette voix, rauque et chaude, je la reconnais ! C’est la seule chose que j’ai trouvée d’à peu près amical et réconfortant dans cette maudite tanière : Robin ! Qu’est-ce qu’il vient faire ici ? N’a-t-il pas retrouvé sa place à la cour de son frère ?

La porte grince atrocement et me fait vriller les tympans. Quelques gouttes d’huile ne seraient pas du luxe. Mais il n’y a jamais personne pour s’occuper de ce genre de choses.

— Bonjour, Sixtine, me salue Robin en s’accroupissant avec difficulté devant ma cellule.

Son visage est tavelé de marques jaunes et bleues, vestiges des violents coups qui lui ont été portés la veille. C’est à la fois impressionnant et rassurant : s’il semble souffrir, ces blessures donnent néanmoins l’impression d’être déjà à un stade de guérison avancé. D’ici peu, elles seront totalement résorbées. Mais même dans cet état, je le trouve captivant. Mon cœur tambourine entre mes côtes, mes jambes flageolent face à son regard vert incandescent. L’émotion qui me traverse la poitrine attise le feu à mes joues.

— Euh… salut, balbutié-je. Qu’est-ce que tu viens faire ici ?

— Ma présence te dérange ? ironise-t-il.

— Non, non ! Pas du tout !

Je me sens si seule que n’importe quelle visite suffirait à combler ce vide qui m’habite. Alors, la sienne est inespérée ! D’habitude, enfin quand je ne suis pas prisonnière d’une meute de loups sauvages, je baigne dans une foule d’anonymes ou alors je suis accompagnée de Neeve et d’Eli ; je n’ai pas l’habitude de la solitude. Me trouver en tête à tête avec le seul loup fréquentable du coin, c’est une aubaine, même si elle n’est que temporaire.

— Est-ce que ça va ? demandé-je en désignant ses plaies.

Il acquiesce, un large sourire sur son visage tuméfié.

— Merci, se contente-t-il de répondre.

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